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    Minimalisme ou la simplicité volontaire

    Le minimalisme est un concept qui est largement discuté, disputé mais aussi et surtout galvaudé. Repris par l’industrie du sport et élevé en principe commercial, on en oublierait que le minimalisme est surtout un état d’esprit où l’essentiel dépasse l’accessoire…

    Depuis que j’ai commencé la course à pied, s’il y a bien un concept qui veut tout dire et ne rien dire, c’est bien celui-là. Entre les chantres du minimalisme comme argument commercial et ceux qui y voient un mode de vie, il n’est pas toujours évident de s’y retrouver. Loin de moi l’idée de vous affirmer quelle orientation suivre, je souhaite simplement construire une réflexion.

    Le Minimalisme ? C’est dans la semelle ?

    Sur ce blog, j’ai déjà abordé la question du minimalisme à travers plusieurs articles consacrés à la foulée naturelle et à la course naturelle. Il s’agit d’une approche déstructurante visant à montrer que la chaussure dite minimaliste n’allait pas vous donner une foulée naturelle. Au contraire, c’est une foulée naturelle qui vous permettra de courir avec une chaussure minimaliste.

    Sur ce point,  j’insistais à propos de la dénomination “minimaliste” appliquée aux chaussures qui est dangereuse à mes yeux. En effet, s’agit principalement d’un argument commercial pour désigner des chaussures à drop réduit. Bien sûr, ces chaussures sont plus légères et possèdent un drop faible n’entravant pas votre foulée naturelle. Je préfère donc parler de chaussures favorisant la foulée naturelle plutôt que de chaussures minimalistes.

    Plus qu’une question sémantique, la croyance (trop?) répandue selon laquelle la chaussure confère une foulée naturelle est non seulement fausse mais dangereuse pour le coureur. Pour moi, ce terme devrait être complètement supprimé du champs lexical des industriels du sport. Il serait quand même malheureux de réduire le “minimalisme” à l’épaisseur et au drop d’une semelle de chaussure, vous ne trouvez pas ?

    Pour moi, il n’y a pas de “minimalisme” dans l’industrie pas plus qu’il n’y a du “maximalisme” etc… Les concepts sont trop dangereux quand ils sont appliqués au business et transformer en caractéristique de produit.

    Minimalisme Trail

    Le Minimalisme ? Un art de vivre ?

    Si l’on en revient aux origines du mot :

    Le minimalisme est une tendance au minimum…

    Cette définition personnelle du minimalisme peut apparaître très simple et pourtant c’est, à mon sens, la charpente même de cet art de vivre ou plutôt de cet art de courir. Courir minimaliste, ce n’est jamais que courir le plus simplement possible : un sentier et l’envie de le découvrir.

    En faisant des recherches pour documenter cet article, j’ai été redirigé par Wikipédia sur la page consacrée au concept de “Simplicité volontaire” dont les penseurs Henry David Thoreau, Tolstoï, Emerson et John Muir rejoignent la philosophie de nombreux trail runners comme Anton Krupicka, Joe GrantMike Foote ou encore Pablo Vigil.

    La simplicité volontaire ou sobriété heureuse est un mode de vie consistant à réduire volontairement sa consommation, ainsi que les impacts de cette dernière, en vue de mener une vie davantage centrée sur des valeurs définies comme « essentielles ».

    SourceWikipédia

    Sans tomber dans le revers altermondialiste et hippie dont a souvent subi ce concept, la simplicité volontaire peut évidemment être aisément mis en parallèle avec la conception du trail running des coureurs précités (et de bien d’autres). Cette course minimaliste se concentre sur l’essentiel. Le souffle, la respiration, le rythme cardiaque deviennent autant de métronomes de notre course. La contemplation du paysage que nous traversons devient l’ascèse minimale motivant notre dépassement.

    Dès lors, il est aisément compréhensible que ces trail runners américains se suffisent à vivre dans un pick up ou une yourte. Leur seul moteur, leur seule motivation est d’être dans la montagne, de “faire de la montagne” et plus généralement d’être dans la Nature… C’est tout ce qui leur importe. Un coucher de soleil au sommet d’une montagne est, pour eux, plus enrichissant qu’une dotation d’un sponsor.

    Dans cette perspective, la course à pied – par essence personnelle – rejoint l’universalité. Le coureur en soif de découvertes repoussent sans cesse ses limites. Il devient l’aventurier de sa vie en choisissant ses objectifs, ses défis, ses terra incognita intérieures. La course à pied n’est pas une fuite mais une rencontre avec soi-même. Elle est une ascèse personnelle qui résonne dans l’universalité de sa pratique.

    Dès lors, et toujours en prenant garde de ne pas tomber dans l’interprétation utopiste du concept, je pense que la course à pied – quelle qu’elle soit – est purement et proprement minimaliste dans sa réalisation. Il n’y a rien de plus simple que de mettre un pied devant l’autre. La fréquence cardiaque rythme nos pas scandant à leur tour notre rythme de course. La course à pied devient une dynamique tellurique voire cosmologique. La course à pied n’est pas un mouvement. Elle symbolise “LE” mouvement.

    Minimalisme Trail

    Le minimalisme ? Simple, léger et rapide…

    A partir du moment où l’on considère la course à pied comme une pratique minimale, que l’on y adosse un mode de vie qui y est fidèle, la simplicité devient le mot d’ordre. Très rapidement, la pratique en elle-même, aussi simple soit-elle dans sa pratique, se voit rapidement mis en relation avec la légèreté et la rapidité.

    Ces deux qualités sont d’ailleurs intrinsèques à la course à pied, discipline que les plus poétiques auront vite fait de comparer au vent caressant les sommets. Il n’en faut pas plus pour que l’aventure devienne fulgurante et s’arroge le droit d’être l’éclair fendant l’horizon.

    Les Trail runners l’ont d’ailleurs bien compris en parcourant la montagne tout en légèreté et en rapidité. Atteindre un sommet, parcourir une ligne de crêtes, parcourir les bois sans l’entrave d’un sac lourd de plusieurs kilos devient le symbole même de la liberté. D’une certaine manière, le Trail running et plus spécifiquement le Skyrunning peut devenir l’expression absolue de l’exploration par sa nature minimale : vaincre les sommets “simplement”, légèrement et rapidement.

    Avec la simplicité dans sa pratique, la légèreté et la rapidité deviennent les deux vertus quasi essentielles du Trail running afin d’atteindre une forme d’équilibre. Et si plus qu’un mode de vie, le Trail running était un art ?

    Julien
    Julienhttps://www.sentiersduphoenix.be
    Je m'appelle Julien, j'ai 34 ans. Je suis passionné d'aventures, de nature et de sports outdoor. Mon blog "Sentiers du Phoenix" est un peu comme mon feu de camps permanent autour duquel je te partage toute ma passion pour l’Aventure, le Trail et la vie en pleine nature. On part ensemble à l'aventure ?

    4 Commentaires

    1. Article très intéressant, merci ! Je ne suis pas sûr d’avoir saisi pourquoi tu as ajouté “Sans tomber dans le revers altermondialiste et hippie dont a souvent subi ce concept” concernant la simplicité volontaire ? Appliquer le minimalisme à la course à pied serait théoriquement ne pas acheter de chaussures du commerce, pas de montre GPS , pas de vetements techniques en dehors de l’essentiel. C’est en effet forcément en partie “altermondialiste” et “hippie” dans le sens où on peut associer l’anti-consumérisme effréné à ces deux mouvances. Henry David Thoreau a vécu dans une putain de cabane dans les bois en autarcie pendant deux ans. Pour ma part je suis encore relativement bien équipé pour la course à pied même si je pense à larguer ma montre GPS et que j’ai hélas acquis avec plaisir des “five fingers”, une récupération mercantile réussie du mouvement minimaliste pour nous faire à nouveau dépenser 100 euros dans des pompes…

      • Bonjour merci pour votre commentaire.
        Effectivement, je parle de la simplicité volontaire en mentionnant le revers altermondialiste et hippie (c’est d’ailleurs le sujet de ma phrase 😉 ).
        Je ne suis pas d’accord de dire que l’application du minimalisme est le rejet de son économie. D’une part, cela serait une application pratique et non théorique ;). D’autre part, je prends toutes les précautions oratoires en début d’article pour dire que je n’interviendrai pas sur le champs économique du problème. Je reste principalement cantonné sur l’aspect philosophique du terme et de son application à l’acte de courir.
        L’anti-consumérisme peut effectivement être associé à ces deux mouvances mais je précise justement que je ne veux pas qu’on galvaude le concept de simplicité volontaire à cela. Il y a des personnes qui, et j’en fais partie, souhaite mener une vie plus simple sans pour autant embrasser les idées altermondialistes.
        Enfin concernant ton achat de “Five Fingers”, mon article veut montrer que non seulement ce n’est pas en achetant des chaussures minimalistes que l’on est forcément “minimaliste” au niveau de la vision de sa pratique et d’autre part, il n’y a pas de mal à avoir du matériel technique tant que l’on est honnête et simple dans sa démarche.
        Enfin, Thoreau a bel et bien vécu dans sa cabane non pas pour poser un acte politique mais pour “sucer toute la moëlle de la vie” autrement dit pour se recentrer sur les choses essentielles. La boucle est bouclée, je suis démasqué, ma conception du minimalisme est une application contemporaine du transcendantalisme américain 😉

    2. Certes l’aspect économique ou politique n’est pas l’essence même du minimalisme. Disons que des actes tels que ceux de Thoreau ou des coureurs pieds nus sont assez inspirants pour nous faire remettre en cause sur certains de ses aspects

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