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    Trail des Hautes Fagnes 2014 (38km et 1000m D+)

    Depuis que j’ai commencé la course à pied, le Trail des Hautes Fagnes me faisait de l’oeil. Il est en effet considéré comme un des plus beaux de Belgique et un de ceux dont le plateau est le plus relevé. Tacitement, je comptais passer sous la barre des 4h30 mais je termine en 5h12 relayé dans les bas-fonds du classement. La cause? Des crampes au ventre dès le 5e kilomètres me bloquant littéralement les jambes. Retour sur les 38 kilomètres les plus douloureux depuis que j’ai commencé la course à pied il y a deux ans.

    Le Trail des Hautes-Fagnes est le cadre du championnat de Belgique de Trail et autant le dire le plateau est relevé voir très relevé : le team Salomon (Charlier, Pasque et Magnée), Davy Lemmens (au top sur la route ces derniers mois), Vincent Wirtgen (Skinfit) et Etienne van Gasse le tenant du titre. Sur papier, Van Gasse est supérieur à ses concurrents : 14e au Trail du Ventoux, 19e au Marathon du Mont Blanc, 55e à Sierre-Zinal et récent vainqueur du 42 km de la Côte d’Opale. La course le prouvera puisqu’il remporte l’épreuve cette année encore.

    Bon c’est bien beau mais je suis loin de batailler avec ces gaillards-là donc je vous parlerai de ma course ou plutôt de mon chemin de croix. Après une nuit légèrement trop courte, je me lève avec un mal de crâne à la limite de la migraine. Je prends deux Aspégic (500 mg) pour soulager la douleur. En route, le temps est couvert et plus on avance vers les hauts plateaux des Fagnes plus il fait brumeux mais il semble que le ciel au dessus est dégagé. C’est de bonne augure pour une belle promenade dans les bois et les Fagnes.

    J’arrive à Xhoffraix. Quelle organisation ! Tout est magnifiquement indiqué. Les bénévoles nous orientent dans un champs qui servira de parking ; lui-même situé à 100m du lieu de départ. C’est parfait. Après les formalités habituelles du retrait du dossard, je pars m’apprêter. On est 30 minutes avant la course. Mon mal de crâne est toujours présent. Je décide donc d’en reprendre un ! Cela sera mon erreur…

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    Le départ est lancé ! Les jambes répondent super bien sur le premier kilomètre. Je me suis calé dans le rythme d’un coureur. Je ne sors pas de ses rails et je n’en sors pas. Les premiers kilomètres se passent sans soucis. C’est roulant comme j’aime, ça déroule bien ! Bref, tout va pour le mieux. Mon mal de crâne a également disparu. Cela s’annonce être une magnifique sortie dans les bois.

    Quand survient la première côte au 5e kilomètre, j’ai les jambes. Cela grimpe facilement. Je n’avais d’ailleurs plus eu une telle sensation en côte depuis longtemps. Malheureusement, c’est à ce moment précis, entre le 5e et le 6e, que j’explose littéralement en vol. Mon ventre commence soudainement à me tirailler avec force. Arrivé au dessus, je veux relancer pas moyen… J’ai les jambes coupées ! Le début de ma galère commence. J’arrive cependant à maintenir un bon rythme. Ce n’est pas trop cassant. J’arrive à maintenir 9,5km/h les 10 premiers kilomètres. Je chuterai à 7 km/h sur les 20 km suivant et descendrai même à 6,3 km/h pour les 8 derniers… Mais au delà de ces chiffres qui ne veulent pas dire grand chose quand on ne connait pas la nature du terrain, je suis clairement dans le dur à partir du 10e et c’est grâce à plusieurs coureurs que j’ai pu atteindre le premier ravitaillement au 13e kilomètre sans trop de soucis et dans un temps raisonnable.

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    Dans cette première section, j’arrive encore à profiter du paysage. Heureusement d’ailleurs parce que ça en vaut la peine. Le single track qu’on emprunte dès le 7e ou 8e kilomètre est tout simplement majestueux à flanc de coteaux et offrant sa vue sur les méandres de la rivière cernée de bois. Ensuite, c’est le château de Reinhardstein qui se profile grandiose et forestier.

    Au ravito justement, je réalise définitivement qu’aujourd’hui il faudra simplement être finisher et que je ne battrai pas mes records personnels… Je prends donc 5 bonnes minutes pour me ravitailler correctement. Je m’hydrate bien, mange plusieurs morceaux de banane, tucs etc. Heureusement, mon estomac en veut bien. Il aurait manqué plus que ça. Je redémarre et dans la descente vers le château mon ventre me semble moins douloureux. On oscille avec le dénivelé pour doucement descendre dans la vallée avant d’attaquer une longue mais très progressive côte de 200 de D+ jusqu’au plateau des Hautes Fagnes. Pendant 3-4 kilomètres, je n’ai presque plus de douleurs. Les jambes ont dur voir très dur mais elles tiennent.

    Ce mieux n’allait être que de courte durée car à partir du 15e kilomètres, tout se détraque à nouveau. Je ne sais même pas vous décrire ces kilomètres. Je n’en profite pas et là seule chose que je regarde sont mes pieds ou ceux du coureur devant moi. C’est vraiment pénible. En pleine montée au kilomètre 18, je craque. Je me mets sur le côté et prends mon téléphone. J’abandonne. Raz-le-bol, j’avais un bon moral, de super bonne jambe et là plus rien ! Je n’ai pas pris une once de plaisir depuis près de 10 bornes. Je téléphone à ma copine pour qu’elle me reprenne au prochain ravito aux alentours du 20e kilomètre.

    Durant les quelques kilomètres suivant, beaucoup de choses me traversent l’esprit. C’est la première fois que j’abandonne, la première fois que je ne finirai pas une course. Et puis, et sans aucune volonté de comparaison, je pense à Anton Krupicka lors de cet UTMB 2014 qui, malgré la douleur, n’a pas abandonné et a terminé sa course quelque soit le classement. Je me pose la question de savoir pourquoi je suis en train de courir dans ces bois et la réponse fuse quasi instantanément : le plaisir mais aussi et surtout le dépassement de soi. Aujourd’hui, le dépassement ne sera pas du côté du chrono, ni du plaisir mais de la douleur. Elle fait partie intégrante d’une course. Il faut souffrir, se dépasser et finir… Dans cette optique, on est meilleur à l’arrivée qu’au départ mais pour ça il faut finir. Je me résous donc à continuer quoiqu’il arrive.

    Au second ravitaillement, je m’arrête encore 5 bonnes minutes. Je mange, je bois. Ça passe… Heureusement, les douleurs au ventre se sont amenuisés et en redémarrant elles se réduisent encore.

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    J’aperçois ma copine et lui fait part de mon plan ! Je vais “mordre sur ma chique” comme disait mon père mais je vais finir cette satanée course. En plus, je voulais absolument courir dans les Hautes-Fagnes. Abandonner juste avant aurait été dommage.

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    Je repars et marche pendant un petit moment et me remet à courir une fois sur le plateau des Hautes Fagnes. Là, les larges chemins roulants vont m’aider à maintenir un rythme pendant un certain temps mais dès que ça redevient plus cassant le rythme chute irrémédiablement. Heureusement, les passages en single tracks sont minoritaires durant cette dizaine de kilomètres à travers les Fagnes. C’est dur mais la simplicité des chemins me permet de “bêtement” allonger et de pouvoir profiter du paysage. Et là, j’en prends plein la vue ! Les passages à travers tout dans la Fagne les pieds dans la tourbe ont quelques choses de particuliers. C’est vraiment un biotope tout à fait spécifique. Je vous invite d’ailleurs, si vous ne connaissez pas, à visiter le site web des Hautes-Fagnes qui vous renseignera sur les caractéristiques du lieu et la chance que l’on a eu de pouvoir le traverser que cela soit à “travers tout” ou sur les traditionnels caillebotis (passages surélevés en bois).

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    Arrivé au 3e et dernier ravitaillement, aux alentours du 30e kilomètres, c’est la même litanie. Je me pose et j’essaie de manger et de m’hydrater un maximum. Un peu plus loin, les jambes qui fonctionnaient me lâchent… et mon ventre recommence à se tordre. Heureusement, il ne reste plus que quelques kilomètres mais il reste néanmoins deux grosses côtes pas piquées des vers qui m’entèrent définitivement. Là, il est franchement temps que cela s’arrête parce que plus rien ne répond. Je me force à me relancer et à courir pendant 500m puis marcher un peu, puis recourir etc… Sans ça, j’aurais terminé en marchant.

    Dans la dernière côte, je vois derrière les arbres que cela s’éclaircit. J’entraperçois un clocher ! Ouf, ça y est ! J’y suis arrivé !!! Je me force à courir, j’encourage un autre coureur avec qui je suis resté un petit temps qui était plein de crampes et l’enjoins à courir. Je mets un pieds devant l’autre, mécaniquement comme depuis 33 kilomètres, dernier virage, les applaudissements ! La ligne d’arrivée !!! J’en ai fini !!!

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    Je finis en 5h12,38 à la 376e place sur 471 classé.

    Mais ce n’est pas le plus important. Comme je le précisais sur Instagram, ma vraie victoire est d’avoir terminé :

    J’ai gagné contre moi-même ! Malgré un chrono me relayant dans les bas-fonds du classement, j’ai eu ma victoire contre mon ventre qui, dès le 5ème km et jusqu’au 38ème, m’a fait souffrir le martyr. Contre ce ventre qui m’a coupé les jambes, qui m’a fait téléphoner à ma copine pour jeter l’éponge, je me suis battu à chaque foulée et j’ai refusé d’abandonner !!! J’ai pensé à @antonkrupicka lors de l’UTMB qui n’a pas abandonné car le Trail est avant tout un combat contre soi-même, c’est un dépassement et qu’importe le chrono, j’ai fini et cela en fait ma plus belle victoire car j’ai vaincu mon plus grand adversaire : moi-même.

    Julien
    Julienhttps://www.sentiersduphoenix.be
    Je m'appelle Julien, j'ai 34 ans. Je suis passionné d'aventures, de nature et de sports outdoor. Mon blog "Sentiers du Phoenix" est un peu comme mon feu de camps permanent autour duquel je te partage toute ma passion pour l’Aventure, le Trail et la vie en pleine nature. On part ensemble à l'aventure ?

    2 Commentaires

    1. sacré récit….je pense immédiatement à mon “combat” durant le trail du hérou de l’année passée…mon premier 36 et surtout 1450 de d+ avalés au moral, à l’envie de me dépasser, d’accrocher ce trail à mon humble tableau de chasse…

      comme toi, j’ai pensé “positif” tout en mettant péniblement un pas devant l’autre….

      le trail est pour moi une expérience sportive et personnelle qui dépasse mes défis en vtt ou en route….une sorte de rencontre avec soi-même…

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